Visage familier du cinéma belge et français des des dernières années, Bouli Lanners développe en parallèle de son parcours d’acteur une carrière de réalisateur, salué tant par la critique que par le public. Ultranova, Eldorado, et plus récemment Les Géants, l’ont imposé comme un auteur à l’univers pictural fort, et à l’humanité mélancolique et généreuse.
De sa formation aux Beaux-arts de Liège, les films de Bouli Lanners ont gardé une indéniable picturalité, sorte de tableaux mouvants exaltant les paysages de son plat pays. Tombé un peu par hasard dans le cinéma, après avoir démarré sa carrière à la télévision sous le signe de la belgitude auprès des Snuls, Bouli Lanners trouve dans cette nouvelle forme d’expression un terrain de jeu prédestiné pour mettre en scène ses rêves de nature et de grands espaces, de familles un peu dysfonctionnelles, souvent recomposées au hasard des rencontres. A la fin des années 90, sa silhouette apparaît de plus en plus régulièrement sur le grand écran, d’abord en arrière-plan, puis dans des rôles de moins en moins seconds, imposant peu à peu son physique tour à tour bourru, lunaire et débonnaire comme une valeur sure du cinéma hexagonal.
Parallèlement, il se lance dans la réalisation dès 1995, passant à la vitesse supérieure en 1999 avec son court métrage TRAVELLINCKX, premier road movie déjà produit par Versus Production. En 2001, son court suivant, MUNO, lui ouvre le bal des sélections cannoises (Quinzaine des Réalisateurs).
Son passage au long avec ULTRANOVA (2005) confirme l’éclosion d’un cinéaste atypique, dont le regard affuté jette une nouvelle lumière sur sa contrée, la Wallonie, et contribue à redéfinir les contours de l’imaginaire cinématographique belge, avec l’aide précieuse de son indéfectible allié, le chef opérateur Jean-Paul de Zaeytijd.
S’en suit ELDORADO (2008), qui signe son retour sur la Croisette, et creuse le sillon d’un nouveau western wallon, road movie bucolique et mélancolique, tout en scope et en émotions, où les riffs de guitare ponctuent le récit de la quête mythique d’un hypothétique Eldorado.
Il reprend la route avec LES GEANTS (2011), une route fluviale où le temps d’un été, trois jeunes garçons se recréent la famille qui les a abandonnés. A la croisée du conte et du film d’aventures, Bouli Lanners interroge une fois encore avec LES GEANTS notre société au travers du prisme familial. Il confirme également sa capacité à créer un cinéma d’auteur populaire, alliant succès critique (le film est une fois de plus sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs), mais aussi public, puisque le film remporte un beau succès aussi bien en Belgique qu’en France.
Bouli Lanners revient en 2015 devant sa propre caméra dans LES PREMIERS LES DERNIERS, son prochain film dont le tournage vient de s’achever dans la Beauce. Ce film, il l’a conçu comme si c’était son dernier, son testament. Il est traversé de ses questionnements, ses inquiétudes, ses angoisses. Il y interprète en duo avec Albert Dupontel, Gilou et Cochise, deux chasseurs de primes en quête d’un smartphone au contenu embarrassant. Au fil de leur route, leur chemin croise notamment ceux de Suzanne Clément, Michael Lonsdale, David Murgia et Aurore Broutin. Une fois encore, ses personnages sont en mouvement, comme si chacun de ses films était une étape du long road movie qu’est sa filmographie. Si les motifs demeurent, les paysages changent, paysage physique de la Beauce qui succèdent à ceux de la Wallonie et du Luxembourg, paysage mental et musical de Pascal Humbert, qui vient prêter ses guitares folk et rugueuses à la bande originale du film. Le film sortira en France le 27 janvier et en Belgique le 24 février 2016.
(Texte : A.E.)